Société bouc-émissiaire
Les médias mettent en exergue la frustration des jeunes, le manque d'opportunités, de futur, les inégalités croissantes comme raisons principales de leur violence. On a aussi mentionné la mort d'un jeune homme appartenant à une communauté ethnique comme possible déclencheur.
Bref, on s'interroge sur les échecs de la société civile, la plaçant au premier rang des accusés dans ces évènements dramatiques, au même rang que les émeutiers! Que l'on fasse son autocritique est louable, mais que l'on puisse à ce point adopter une position d'auto-dénigration, qui va jusqu'à faire porter le fardeau de la faute à tout un peuple, un pays, ses institutions est auto-destructeur. C'est une abdication, une soumission, une lâcheté.
Idéologie
Si l'on se focalise autant sur ce type de cause c'est parce que les médias, les hommes politiques et disons-le la majorité de l'opinion, influencé par les thèses progressistes (de gauche comme de droite), ne réfléchissent plus qu'au travers du prisme de l'idéologie. Chacun pousse ses pions et veut interpréter les événements en fonction de ce qui pourra étayer une thèse, la sienne en particulier. Les uns blâmeront l'immigration, le multi-culturalisme, les autres l'ultra-libéralisme et les inégalités sociales qu'il a engendré.
Tout va bien, surtout gardez les yeux bien fermés...
Sans vouloir nier la réalité de ces causes mécaniques, directes, il faudrait s'intéresser à d'autres causes.
On a vite fait d'exploiter les failles du système, des institutions: c'est facile, personne n'est vraiment responsable. On évite d'accuser. Mais les causes extérieures aux individus sont la forêt qui cache l'arbre.
Empathie
La première erreur consiste à croire que les gens autour de nous agissent avec raison, et avec un motif. On projette sur les autres. C'est assez naturel dans l'élaboration d'une réflexion. La raison des uns a du mal à s'accommoder de la folie des autres. Il faut rationaliser, et il est plus rassurant pour l'esprit humain d'élaborer une théorie du complot farfelue mais argumentée, que de contempler dans l'abîme: l'absence d'explication, l'absence de raison, la folie humaine.
On croira donc que ces jeunes ont des raisons de manifester -fût-ce violemment- leur mécontentement: ils sont brimés par la police, frustré par la société, ont vécu des enfances difficiles sans amour, et sont défavorisés économiquement.
On croira aussi qu'ils ont une revendication politique. Quoi de plus naturel? Après tout, même le terroriste revendique quelque chose, un idéal politique. Le geste terroriste a toujours une fonction, même si il est incompréhensible pour les démocrates, citoyens. Avec la cure d'austérité que le Royaume-Uni s'est imposé depuis plus d'un an, l'action et la revendication politique sont plus que d'actualité.
Mais on peine à rattacher ces violences à des revendications, on peine même à les expliquer par des motifs: certains des jeunes qui pillaient ces derniers jours sont issus de classes moyennes, par forcément défavorisés économiquement.
Alors quoi?
Le vide.
Le vide existentiel, le désoeuvrement, l'absence de dessein "expliquent" ces actions. Un grand nombre de jeunes répondront qu'il ne savaient pas ce qu'ils faisaient, pourquoi ils le faisaient.
Ce qui est préoccupant ce n'est pas les conditions que la société a créées (misère économique, sociale, psychologique...) mais la faillite à armer les citoyens contre ces aléas. Le désoeuvrement a sans doute toujours existé, mais on a jamais vu un tel déchainement de violence de la part d'individus si jeunes.
Le manque de référence, de garde fous (moraux?), peut-être le matérialisme (pas en tant que besoin de consommer, mais la négation du spirituel) sont également des explications de cette crise.
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Add. Rôle modérateur ou partisan des médias?
Le Monde fait un article hier sur la vision très exagérée des évènements dans les comptes rendus télévisuels ou journalistiques. http://abonnes.lemonde.fr/europe/article/2011/08/08/londres-l-ampleur-que-cela-prend-dans-les-medias-est-disproportionnee_1557444_3214.html
La Reppublicca (Italie) relativise beaucoup la question ethnique en postant des photos de britanniques blancs.
On peut s'interroger sur le fait qu'en modérant leur propos, et en éludant la question ethnique ils ne causent pas en fait un mal plus grand: le déni des problèmes et la frustration qu'il engendre mécaniquement. Modérateur? À court terme oui, mais à long terme, on pourra dire que les médias de centre gauche ont en fait soufflé sur les braises.
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